Renzo Novatore, “Je… / I…”

Je…

Je fus toujours celui que je fus, et je serai celui que je pourrai être ; car deux sujets relatifs seuls sont vrais: le soleil ne pourrait être la lune, mais si par hypothèse il la devait devenir, il ne serait plus le soleil. Qui est-ce donc qui veut dévier mon cours ?

N’endiguez pas les fleuves, à vous qui avez du bon sens.

Laissez courir la violence joyeuse sur son lit tranquille. Ne voyez-vous pas comme elle chante allègrement en se hâtant vers son océan ?

Je vous le dis, ô sages : Ne rendez pas tragique ce qui peut être allègre. Ce serait faire du mal à tous, mais le pire mal ce serait encore aux dépens de la beauté humaine.

Et que ceci soit dit encore une fois aux oreilles trop longues de l’antique aristocratie, car ce n’est pas seulement un privilège de caste de vivre superbement au-delà du bien et du mal, mais encore un privilège de force et de bon goût… de toute Force, de tout bon goût.

Quand donc poindra le jour où l’homme deviendra un Dieu de Joie et de Rire.

Qui nous empêchera de faire du monde entier un fête, une libre et magnifique fête ?

Nous l’avons annoncé.

Laissez tout fleuve courir vers son océan, aux accents de ses joyeuses chansons.

Je suis celui qui est et je vais vers mon océan, lequel est beau, profond et joyeux, parce qu’il est mien — uniquement mien.

Malheur aux riverains s’ils entravent mon cours !

Renzo Novatore.

[Extrait de Gaie Follie del Dolore ridente. — « Gaies folies de la douleur qui rit » — à paraître
prochainement.]

I…

I have always been the one that I was, and I will always be the one that I could be; for two relative subjects alone are true: the sun could not become the moon, but if by some chance it should become it, it would no longer be the sun. So who is it that wishes to divert my course?

Do not dam the river, if you have good sense.

Let the joyous violence rush along its tranquil bed. Don’t you see how merrily it sings as it hastens towards its ocean?

I say to you, wise ones: Do not make tragic what can be cheerful. That would be an injury to everything, but the worst harm would be at the expense of human beauty.

And let this be said once again to the too-long ears of the ancient aristocracy, for it is not only a privilege of caste to live superbly beyond good and evil, but also a privilege of strength and good taste… of all strength, of all good taste.

So when will the day break when a man will become a God of Joy and Laughter?

Who would prevent us from making of the entire world a celebration, a free and magnificent feast?

We have announced it.

Let every river rush toward its ocean, to the accents of its joyous songs.

I am the one who is and I go toward my ocean, which is beautiful, deep and joyful, because it is mine — uniquely mine.

Woe to those who live near my banks, if they should obstruct my course!

Renzo Novatore.

Renzo Novatore, “Je…,” l’en dehors 4 no. 51 (15 Janvier 1925): 2.

[Working translation by Shawn P. Wilbur]

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