Gérard de Lacaze-Duthiers, “En Médiocratie” (1923)

En Médiocratie

« Comptez vos Allumettes », c’est ainsi que la grande presse fait l’éducation du public qui s’abrutit pendant des heures à compter des bouts de bois pour obtenir un prix dans un concours. 500.000 francs est la somme promise au gagnant. Pendant ce temps, le peuple ne pense pas à autre chose. Son esprit est occupé par cette niaiserie. Qu’importe que l’Etat l’accable d’impôts ! Il sait qu’il peut gagner un demi-million qui lui permettra de faire face aux exigences du percepteur!

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In Mediocracy

“Count your matches!” — this is how the mainstream press educates the public, which wears itself out for hours counting sticks to get a prize in a competition. 500,000 francs is the sum promised to the winner. During this time, the people do not think of anything else. Their minds are occupied with this silliness. What does it matter that the State burdens them with taxes! They know that can win half a million, which will allow them to meet the demands of the tax collector!

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Tout l’art des civilisés consiste à découvrir des moyens plus ou moins propres pour faire passer l’argent d’une poche dans une autre. Il s’agit de gagner beaucoup afin de jouir bassement de l’existence. C’est ce qu’on appelle la lutte pour la vie, qu’il serait beaucoup plus juste d’appeler la lutte pour la mort.

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The whole art of the Civilized consists of discovering more or less proper means of making money pass from one pocket to another. It is a question of earning a lot in order to enjoy a base existence. What we call the struggle for life would be much more accurately called the struggle for death.

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Les « jurés » condamnent à mort par erreur des innocents, sans savoir ni ce qu’on leur demande ni ce qu’ils signent (c’est l’exception, car la plupart du temps ils savent ce qu’ils font et condamnent par ordre). Voilà la justice de la société bourgeoise et démocratique dans laquelle, pour notre malheur, le sort nous’a jetés. L’institution du jury est une belle institution. C’est le peuple exerçant lui-même la justice, et comment ! Tant que l’humanité sera dirigée par les imbéciles, les ignorants et la canaille, l’iniquité l’emportera sur la bonté, la vérité et la beauté !

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The “jurors” condemn innocent people to death by mistake, without knowing either what they are asked or what they are signing (this is the exception, because most of the time they know what they are doing and condemn on command.) This is the justice of bourgeois and democratic society into which, to our misfortune, fate has cast us. The institution of the jury is a fine institution. It is the people themselves exercising justice, and how! As long as humanity is ruled by fools, ignorant and scoundrels, iniquity will trump goodness, truth and beauty!

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On fait la queue pour le pain, comme on l’a faite pour le lait, comme on la fait toujours pour quelque chose en France. Se moquer du monde, est dans les habitudes de l’administration. Le peuple qui, stationne aux, portes des boutiques attendant des heures la distribution des vivres, prend son mal en patience en lisant les journaux. De plus en plus la vie devient insupportable dans nos pays « civilisés ». Dans les conflits entre le capital et le travail, la population et les mercantis, cherchez le principal coupable, c’est l’Etat. Il est la cause de la plupart des maux qui accablent l’humanité.

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We stand in line for bread, as we do for milk, as we always do for something in France. It is the practice of the administration to laugh at the world. The people who, stationed at the doors of the shops waiting for hours for the distribution of food, bear their troubles patiently, reading the newspapers. More and more, life is becoming unbearable in our “civilized” countries. In the conflicts between capital and labor, the population and the mercantis, seek the principal culprit; it is the State. It is the cause of most of the evils that afflict humanity.

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Un moyen commode d’empêcher ses adversaires de parler, c’est de leur fermer la bouche par le vote d’une loi. De la sorte, ils sont mis hors d’état de nuire. Non seulement ils n’ont pas le droit d’exposer leurs idées en public, mais si, poursuivis devant un tribunal, ils essaient de les exprimer, la publicité des débats est interdite. C’est l’étouffement pur et simple de la liberté d’opinion. C’est ainsi qu’en régime démocratique on tolère la pensée d’autrui.

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A convenient way to prevent opponents from speaking is to shut their mouths by passing a law. In this way, they are put out of harm’s way. Not only do they not have the right to present their ideas in public, but if, prosecuted in court, they try to express them, publicity of the proceedings is prohibited. It is the outright suffocation of freedom of opinion. This is how we tolerate the thoughts of others in a democratic regime.

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Nos gouvernants, incapables d’avoir des idées, font tout ce qu’ils peuvent pour empêcher les autres d’en avoir. Ils votent à tour de bras des lois superscélérates pour étouffer la pensée libre. Ils ont pour eux la force. Devant cette vague de persécution il convient de hausser les épaules. Continuons comme par le passé à dire ce que nous pensons, et agissons en conséquence. Nous aurons le dernier mot.

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Our rulers, incapable of having ideas of their own, do all they can to prevent others from having them. They are swiftly voting for more-than-villainous laws to stifle free thought. They have force on their side. In the face of this wave of persecution, we should shrug our shoulders. Let’s continue to speak our minds as in the past, and act accordingly. We will have the last word.

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La guerre du droit apparait sous son vrai jour depuis qu’on découvre des « crimes militaires », et qu’enfin la lumière se fait sur ces ignominies. Les coupables seront-ils châtiés ? C’est douteux. Mais s’ils l’étaient, leur châtiment ne ferait pas revivre les morts. C’est chose épouvantable de penser que ceux qui ont assisté à ces crimes ne se soient pas révoltés et n’aient pas sur le champ puni les assassins. Lis disent qu’ils furent impuissants à empêcher ces « meurtres » et qu’ils pleuraient en exécutant les ordres infâmes. Ils ont laissé fusiller leurs camarades qu’ils savaient innocents. C’est ignoble. Le courage fait défaut aux hommes quand il s’agit d’en avoir vraiment.

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The war of law appeared in its true light when we discovered “military crimes,” and light was finally shone on these appalling acts. Will the culprits be punished? It is doubtful. But if they were, their retribution would not revive the dead. It is appalling to think that those who witnessed these crimes did not revolt and punish the murderers on the spot. They say that they were powerless to prevent these “murders” and wept as they carried out the vile orders. They let their comrades, whom they knew were innocent, be shot. It is despicable. Courage is lacking in men when it is a question of really having it.

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Dans cette société, vous payez cher la soi-disant erreur d’un moment. Pour une satisfaction bénigne, souvent vous gâche toute une vie. C’est pourquoi il faut constamment s’observer, ne pas manquer aux règles de l’usage et de la bienséance, ne pas violer ouvertement la morale, enfin ne se mettre dans aucun des cas susceptibles de vous nuire. La société n’attend qu’une occasion pour vous prendre en faute.

Il faut répondre par la ruse à la force et par le mépris à la provocation.

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In this society, you pay dearly for a so-called one-time mistake. To satisfy a minor wrong, we often ruin a whole life. This is why you must constantly observe, not violate the rules of usage and decorum, nor openly violate morality, nor, finally, put yourself in any circumstance likely to harm you. Society is just waiting for an opportunity to catch you at fault.

We must respond to force with cunning and to provocation with scorn.

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C’est surtout quand vous avez raison que la société vous donne tort.

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It is especially when you are right that society rules against you.

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La justice est lente à arrêter les hommes qui, profitant de leur situation, ont fait fortune par des procédés malhonnêtes. Ce n’est que contraints que les bourgeois se décident à inculper de « délit de fonctionnaires » un sous-ministre quelconque. Les magistrats usent de tous les ménagements pour signifier aux coupables l’arrêt qui les frappe. Si l’affaire n’a pas été étouffée, ce n’est pas de leur faute. On ne procède pas avec la même méthode quand il s’agit d’emprisonner les « militants ». On les arrête illico sans leur dire pourquoi. On leur refuse ensuite leur « mise en liberté provisoire » et on les laisse moisir pendant des mois dans des geôles !

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Justice is slow to arrest men who, taking advantage of their situation, have made their fortunes by dishonest methods. It was only when forced to do so that the bourgeoisie decide to charge any deputy minister with a “civil service offense.” The magistrates use every precaution to notify the guilty of the judgment against them. If the matter is not hushed up, it is not their fault. They do not proceed with the same method when it comes to imprisoning “militants.” We arrest them, pronto, without telling them why. They are then denied their “provisional release” and left to rot for months in jails!

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La société est redoutablement armée pour punir l’individu qui enfreint ses lois et ses préceptes. Comment se tirer du mauvais pas où l’indépendance et la sincérité vous ont jeté ? C’est chose impossible. Vous êtes vaincu d’avance. Il n’y a rien à faire contre une organisation dirigée toute entière contre la liberté individuelle.

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Society is formidably armed to punish the individual who transgresses its laws and precepts. How do you get out of the tight spot where independence and honesty have thrown you? It is impossible. You are defeated in advance. There is nothing to be done against an entire organization directed against individual freedom.

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La guerre nous vaut de ne plus faire un pas, non seulement sans entendre des insanités, mais sans contempler ces pustules qui poussent à la surface du globe qu’on appelle des « monuments commémoratifs ».

Gérard de LACAZE-DUTHIERS.

Gerard de Lacaze-Duthiers, “En médiocratie,” l’en dehors 2 no. 6 (début Février 1923): 1-2.

War makes it so we cannot take another step, not just without hearing insanities, but without contemplating these pustules which push up on the surface of the globe that we call “commemorative monuments.”

Gérard de LACAZE-DUTHIERS.


En Médiocratie

Il est probable que nous connaîtrons d’ici peu une nouvelle inquisition, qui nous ramènera en plein moyen âge : les savants seront brûlés, les penseurs torturés sur les places publiques, les artistes mis en croix… Les bourgeois inventent des supplices inédits pour se débarrasser de leurs adversaires. Tout est possible dans un monde où règnent la bêtise et la peur.

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In Mediocracy

It is likely that we will soon experience a new inquisition, which will bring us back to the Middle Ages: scholars will be burned, thinkers tortured in public places, artists crucified… The bourgeois invent new tortures to rid themselves of their adversaries. Everything is possible in a world where stupidity and fear reign.

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Rémobilisation, ce vocable sonne mal à certaines oreilles. D’autres exultent en l’entendant : c’est pour elles tout un monde de gloire qui est évoqué : morts héroïques, reculs stratégiques, investissements, « on les aura », « jusqu’au bout », etc. Les individus se réjouissent à l’idée que l’aventure va recommencer, qu’ils vont passer par les mêmes émotions, que le drame va se jouer de nouveau — loin d’eux ! — et qu’ils auront maintes fois l’occasion de donner des conseils et d’épingler des drapeaux sur des cartes.

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Remobilization: this word sounds wicked to some ears. Others rejoice when they hear it; for them, a whole world of glory is evoked: heroic deaths, strategic retreats, investments, “we will have them,” “until the end,” etc. Individuals rejoice at the idea that the adventure will begin again, that they will go through the same emotions, that the drama will play out again — far from them! — and that they will have occasion, time and again, to give advice and pin flags on maps.

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Oui, citons le cas de Branly, obligé, pour vivre, de faire un métier sans rapport avec ses travaux, pendant que des brutes, qui ne servent à rien, gagnent de l’or et ne savent pas s’en servir. Ce qui prouve à quel point notre prétendue humanité civilisée est inférieure, et cette partie de l’humanité qui s’appelle la France, pays du droit et de la liberté, a usurpé sa réputation, les mercantis et les politiciens faisant la loi chez elle.

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Yes, let us cite the case of [Édouard] Branly, obliged, in order to live, to pursue a trade unrelated to his work, while good-for-nothing brutes earn gold and don’t know what to do with it. It proves to what extent our so-called civilized humanity is inferior, and that portion of humanity that calls itself France, country of right and liberty, has usurped its reputation, the mercantis and the politicians making the law among themselves.

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Ce qui me surpasse, c’est le cynisme de ces dirigeants qui, la veille anarchistes, incarnent aujourd’hui l’autorité la plus absolue. Il sont pire que les rois. « On a bien le droit d’évoluer, me dira-t-on, et de reconnaitre ses erreurs ». Parfaitement, maïs ce n’est point ici le cas. Il ne s’agit pour eux ni d’évoluer ni de reconnaitre leurs erreurs, il s’agit d’ « arriver » par tous les moyens. C’est dans ce but qu’ils se renient. Ce sont des pantins. Ces êtres sans conscience sont capables de tout. Leur cynisme à quelque chose de révoltant. La sincérité qui évolue, qui reconnait qu’elle s’est trompée — à tort où a raison — n’est point celle des politiciens. Elle n’est pas dans leurs habitudes. Ce qui est dans leurs habitudes, c’est la trahison.

Pendant longtemps ce sera aux cérémonies des « distributions de prix » les mêmes clichés ineptes, les mêmes souffles de haine, qu’applaudiront les assistants aux mines compassées. Combien ce qui est officiel est artificiel ! « Grandeur de la patrie », « souvenir des héros », « la France victorieuse », « intérêt supérieur de l’humanité », « cité future », etc. Ce pot pourri de banalités suffit à contenter les cerveaux vides et les âmes amorphes. Comme on se sent loin de tout cela !

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What astonishes me is the cynicism of those leaders who, anarchists yesterday, today incarnate the most absolute authority. They are worse than the kings. “They have a right to evolve,” someone says to me, “and to recognize their errors.” Absolutely, but that is not the case here. For them, it is neither a question of evolving or of recognizing their errors, but a question of “arriving” by any means. It is for this reason that they abandon their convictions. They are puppets. These conscienceless beings are capable of anything. There is something revolting about their cynicism. The honesty that evolves, that admits that it has been mistaken — correctly or incorrectly — is not that of the politicians. It is not among their habits. What is among their habits is treason.

For a long time, at the ceremonies for the “distributions of prizes,” there will be the same foolish clichés, the same murmurs of hatred, applauded by assistants with starchy complexions. How artificial is that which is official! “Greatness of the homeland,” “memory of the heros,” “France victorious,” “higher interest of humanity,” “future society,” etc. That potpourri of banalities is enough to satisfy empty heads and lifeless souls. How distant we feel from all that!

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Les bourgeois sont à ce point cyniques — ou incohérents qu’on voit leurs ministres applaudir un drame individualiste, qu’on entend leurs juges faire l’apologie de la justice et leurs politiciens acclamer la beauté. C’est un spectacle qui n’a rien d’étonnant dans un monde où le mensonge est dieu. Il est en harmonie avec tout le reste.

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The bourgeois are so cynical — or incoherent — that you will see their ministers applaud an individualist drama, hear their judges champion justice and their politicians hail beauty. It is a spectacle that is not at all astonishing in a world where the lie is god. It is in harmony with all the rest.

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La bourgeoisie a recours à toutes sortes d’expédients pour se venger de ceux qui lui déplaisent. Ne pas penser comme elle est un crime. Il faut s’attendre à être traqué sans pitié par ses représentants, chaque fois qu’on voudra exprimer une opinion sincère, une idée libre et hardie. Elle ne recule devant rien, pas même l’assassinat, pour vous empêcher d’être vous-même.

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The bourgeoisie has recourse to all sorts of expedients in order to avenge itself on those who displease it. To not think like it is a crime. We must expect to be hunted down pitilessly by its representatives, each time that we wish to express a sincere opinion, a free and bold idea. It will stop at nothing, not even murder, to prevent you from being yourself.

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Nos camarades d’il y a vingt ans sont devenus ministres et sous-ministres, personnages influents dans l’administration, rédacteurs aux journaux les plus bourgeois, et ils portent ostensiblement à leur boutonnière le ruban de la Légion d’honneur ! Je plains sincèrement ces transfuges de l’anarchie. Ils ont cru plus pratique de se renier que de rester fidèles à leurs idées. Quelles que soient leur situation et leur fortune, ce sont des « ratés ».

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Our comrades of twenty years ago have become ministers and deputy ministers, influential figures in the administration, editors of the most bourgeois newspapers, and they wear the ribbon of the Legion of Honor conspicuously on their lapel! I sincerely pity these defectors from anarchy. They have thought it was more practical to renounce their ideas than to remain faithful to them. Whatever their situation and their fortunes, they are “losers.”

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La « vague de pudeur » qui agite le monde bourgeois, qui est le plus immoral des mondes, achève de le couvrir de ridicule. Ces gens-là voient le mal où il n’est pas : leur imagination le crée ; ils voudraient nous imposer leur conception de la vertu, aussi niaise qu’incohérente. Au nom de cette conception ils condamnent tout ce qui est sain, normal et bien portant, ils n’ont de sympathie que pour ce qui se cache, ce qui ment, ce qui est laid. Leur pudeur est un masque hypocrité et sournois.

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The “wave of modesty” that shakes the bourgeois world, which is the most immoral of worlds, manages to cover it in ridicule. Those people see evil where the is none: their imagination creates it; they want to impose on us their conception of virtue, as silly as it is incoherent. In the name of that conception they condemn everything that is wholesome, normal healthy. They only have sympathy for what is hidden, what lies, what is ugly. Their modesty is a hypocritical and deceitful mask.

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La presse sème de « diversion » notre existence quotidienne. Détourner l’esprit du public d’un scandale où sont compromis des membres du gouvernement, et l’orienter vers un fait divers quelconque, qu’on fait trainer en longueur, est chez elle une tradition. On ne compte plus les « affaires », les « histoires », les « attentats » et les « complots » dont elle inonde ses colonnes pour tenir en haleine l’imagination de ses lecteurs, vendre son papier, et « blanchir » les scélérats qui ont payé la forte somme.

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The press scatters “diversions” in our daily existence. To divert the mind of the public from a scandal in which members of the government are compromised, and direct it towards some minor news iterm, which is drawn out at length, is a tradition for it. We no longer count the “affairs,” the “stories,” the “outrages” and the “plots” with which it inundates its columns in order to keep its readers in suspense, sell its paper and “whitewash” the crooks who have paid large sums.

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Les gouvernements ne montrent pas plus d’empressement à réhabiliter les innocents qu’à punir les coupables. Leur justice est tardive pour les uns comme pour les autres. Pour les premiers comme pour les seconds. Ils n’agissent que contraints : reconnaitre leurs erreurs dans les deux cas est une tâche au-dessus de leurs forces.

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Governments show themselves no more eager to rehabilitate the innocent than to punish the guilty. Their justice comes late for the one and the other, for the first as for the second. They only act when forced: to recognize their errors in either case is a task beyond their powers.

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Il y a dans chaque pays un parti qui recrute ses adhérents dans tous les partis — vraiment « révolutionnaire ». Il se charge de voter les lois scélérates, d’en voyer le peuple à la boucherie, d’abrutir l’espèce humaine. Ce parti est fort et respecté. Il réalise l’Internationale du crime.

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There is in each country a party that recruits its members from all the parties — truly “revolutionary.” They are responsible for passing the lois scélérates, for sending the people to the slaughter, for stupefying the human species. This party is strong and respected. It makes up the International of Crime.

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Les « assassins » se recrutent parmi les gens qui gouvernent, Non seulement ceux ci décrètent la mort de millions d’hommes dans les guerres fratricides, mais afin d’indisposer le public contre les « anarchistes » et les « communistes », leurs agents provocateurs se chargent de multiplier les « attentats » de toute espèce. La répression sévit ensuite, impitoyable, frappant au petit bonheur les militants, — contentant les idiots et consolidant le pouvoir des brutes.

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The “assassins” are recruited from among the people who govern. Not only do they decree the death of millions of men in fratricidal wars, but in order to antagonize the public against the “anarchists” and the “communists,” their agents provocateurs are responsible for multiplying “attacks” of all sorts. Then the repression clamps down, pitiless, striking the militants haphazardly, — satisfying the idiots and consolidating the power of the brutes.

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Faire servir l’art à des fins politiques, patriotiques et charitables, et dans les habitudes de la bourgeoisie. Tour à tour la peinture et la sculpture, la musique et la poésie, prêtent leur concours à des « fêtes » mondiales ou… populaires. On paie pour visiter, voir et entendre. Les ennemis de la beauté l’utilisent pour toutes sortes d’œuvres philanthropiques et sociales. Ils ramassent de l’or par son intermédiaire, mais se garderaient bien de donner un centime pour une œuvre dont le caractère serait purement artistique.

Gérard de Lacaze-Duthiers.

Gerard de Lacaze-Duthiers, “En médiocratie,” l’en dehors 2 no. 7 (fin Février 1923): 2.

Art is made to serve political, patriotic and charitable ends, in the customs of the bourgeoisie. Each in their turn, painting and sculpture, music and poetry, lend their support to global or… popular “festivals.” We pay to visit, to see and to listen. The enemies of beauty use it for all kinds of philanthropic and social works. They collect gold through it, but would be careful not to give a cent for a work of a purely artistic character.

Gérard de Lacaze-Duthiers.


En Médiocratie

On voit maintenant, dans chaque administration, institut, société, etc… des plaques commémoratives sur lesquelles figurent les noms de leurs employés tombés au champ d’honneur. C’est à qui étalera la plus longue liste, tirera vanité d’avoir eu lé plus grand nombre de morts et refera un piédestal de leurs cadavres.

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Certaines gens ne manquent pas d’un certain toupet. Après vous avoir condamné à mort, au nom du patriotisme, ils vous demandent au nom du patriotisme, de leur donner de l’argent. Cette aventure vient d’arriver à un condamné à mort par contumace, et ce sont ses juges qui lui demandent l’aumône !

Gérard de LACAZE-DUTHIERS.

Gerard de Lacaze-Duthiers, “En médiocratie,” l’en dehors 2 no. 8 (mi-Mars 1923): 2.

In Mediocracy

We see now, in each administration, institute, society, etc… commemorative plaques on which appear the names of their employees that have fallen on the field of honor. Those who can display the longest list, will take pride in having the greatest number of dead and build a pedestal from their corpses.

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Some people do not lack a certain amount of nerve. After condemning you to death, in the name of patriotism, they ask you, in the name of patriotism, to give them money. This adventure just happened to a man condemned to death in absentia, and it was his judges who asked him for alms!

Gérard de LACAZE-DUTHIERS.

Gerard de Lacaze-Duthiers, “En médiocratie,” l’en dehors 2 no. 8 (mi-Mars 1923): 2.

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